[...] Subitement, un froissement de
feuilles perça le silence. Une bête ressemblant à un poney sortit du sous-bois
et tomba face contre terre. Péniblement, l’animal se releva sur ses pattes en
tentant de garder son équilibre. Il n’avait pas l’air dangereux. Intriguée,
Isory s’en approcha doucement. L’animal semblait plus curieux qu’effrayé. Il
étira le cou pour sentir la cape d’Isory. Celle-ci renifla aussitôt une odeur
faisant étrangement penser à de l’alcool. Elle remarqua aussi les yeux du poney
qui n’arrêtaient pas de bouger. D’un geste énergique, elle tenta de chasser la
puanteur tout en faisant la morale au cheval.
– Beurk
! Ouache ! Tu sens mauvais. On ne t’a jamais dit que c’est impoli de souffler
au visage des gens ?
Au même instant, l’animal s’écroula par
terre. Spontanément, Isory s’accroupit près de lui et posa l’oreille sur son
ventre. Il était bien vivant.
– Il
a l’air soûl ! Comme c’est bizarre !
Elle entendit alors un nouveau
froissement des feuilles, suivi de craquements secs, comme si on cassait des
branches. Elle se doutait bien qu’un autre spécimen allait faire son
apparition. Et comme de fait, un deuxième poney sortit du sousbois en titubant
lui aussi. En le voyant, elle se mit à ricaner.
C’est alors qu’un oiseau gigantesque
avec une tête d’aigle surgit derrière lui et l’attaqua. En quelques secondes à
peine, il égorgea le petit cheval avec son bec coupant. Ensuite, il l’empoigna
avec ses immenses serres et, d’un coup de bec, transperça la chair chaude de sa
victime pour assouvir sa faim. Isory était glacée d’horreur. Rester là n’était
pas une option, car elle savait bien qu’elle servirait de dessert lorsque
l’oiseau de proie aurait terminé avec le poney. Mais sa peur était telle
qu’elle arrivait à peine à respirer, et encore moins à bouger. Elle se parla
pour tenter de se ressaisir :
– Passe
à l’action, Isory. Allez ! Fais preuve de courage.
Elle essayait de garder son calme, mais
elle frémissait. Finalement, elle réussit à se mouvoir. Sans quitter des yeux
le monstre à deux pattes, elle s’éloigna tranquillement sur la pointe de ses
bottes à tuyau. Par malheur, elle trébucha sur une racine d’arbre qui
traversait le sentier et tomba brusquement. Elle avait l’impression de se
retrouver dans un film d’horreur. L’oiseau arrêta sur-le-champ son carnage et
leva la tête. Il était couvert de sang. Il fixa Isory un certain temps, puis
gonfla ses plumes et ouvrit son bec pour pousser un cri à faire glacer le sang
dans les veines. Isory se releva promptement et se mit à courir de toutes ses
forces. À son grand malheur, ses mouvements éveillèrent l’instinct du prédateur
qui la prit en chasse, courant derrière elle. Le sol tremblait de plus en plus
sous les pieds d’Isory qui sentait la bête se rapprocher rapidement. Elle
tourna la tête et aperçut l’oiseau qui s’apprêtait à l’attaquer.
– AAAAAAAAAAAAH
!
Isory posa son regard sur une branche
d’un arbre immense qui se trouvait à quelques pas devant elle et, sans
comprendre d’où venait la voix qui lui parlait, elle commanda à son corps d’exécuter
ses ordres. Elle sentit alors une force soudaine pousser son corps vers l’avant
et l’emporter dans les airs. Criant sans retenue, elle continua de courir dans
le vide. Son élan la précipita contre les branches de l’arbre, d’où elle
retomba lourdement sur le sol. Étourdie, Isory voyait les arbres bouger autour
d’elle. Elle secoua la tête afin de reprendre ses esprits. L’oiseau s’approcha
et se transforma instantanément en gnome. Bouche bée et encore un peu étourdie,
elle observa le petit bonhomme, qui lui adressa la parole [...].
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire